Communiqué
30 juin 2021
Les adhérents du RIF se sont réunis en Assemblée Générale au cours du mois de mai 2021. L’occasion d’élire un nouveau Conseil d’administration (détail ici) mais également de faire le bilan des actions du réseau au terme d’une année très compliquée et dans le contexte d’une reprise aux multiples enjeux.
Ces 18 mois de crise que nous venons de traverser ont mis à mal l’ensemble du secteur culturel en imposant l’arrêt de la plupart de nos activités. Tout au long de cette période, le RIF s’est attaché à accompagner ses adhérents face aux difficultés et incertitudes générées, en étant un espace de ressource et d’échange, permettant ainsi aux acteur·rices de sortir de l’isolement et de partager leurs expériences. Cela a notamment facilité l’adaptation des équipes et des projets avec une réactivité remarquable. De très nombreuses structures ont ainsi réussi à maintenir des activités à distance et un lien avec les musicien·nes, les bénévoles, les adhérent·es. La crise a aussi montré qu’en complément des aides exceptionnelles et indispensables déployées par l’Etat et les collectivités territoriales, les mécanismes de solidarité entre adhérents, et plus largement entre acteurs du champ des musiques actuelles, pouvaient fonctionner et que les dispositifs de coopération (autour de l’accompagnement artistique, de la diffusion, de l’action culturelle et pédagogique…) portés par le RIF constituaient des bons leviers pour préserver un écosystème riche et diversifié. Il nous appartiendra dans les prochains mois de les porter plus largement et d’en généraliser les principes. Trois ans après la fusion des réseaux musiques actuelles départementaux en Ile-de-France, la pertinence d’un espace de solidarité, de dialogue et de coopération commun au niveau régional apparait donc d’autant plus grande.
Cette solidarité entre acteurs, la défense de l’intérêt général, le respect des équilibres territoriaux, de la diversité des pratiques, des esthétiques et l’égale dignité des personnes, sont au cœur du projet de notre réseau. Dans les musiques actuelles, comme dans le reste de la société, la crise agit comme un révélateur et un amplificateur des fractures et inégalités souvent préexistantes. Dans un contexte de concurrence accrue et de mise en marché généralisée, de concentration économique et institutionnelle, ce sont les plus fragiles qui sont aujourd’hui touchés le plus durement : les artistes, technicien·nes, intermittent·es ou non, prestataires, précaires en tout genre. Nous devons également prendre garde à ce qu’à travers cette épidémie ne s’installent pas le repli sur soi voire la peur de l’autre qui sont l’antithèse des valeurs autour desquelles nous déployons au quotidien nos projets culturels et artistiques.
Dans cette période charnière, nous appelons aujourd’hui à une vigilance collective quant aux choix et aux orientations que nous prenons pour la reprise et la relance que nous souhaitons durable. La priorité est pour nous à la reconstruction du lien social, au soin apporté aux plus fragiles, à cette myriade de petites structures et initiatives culturelles qui maillent l’Ile-de-France : associations et collectifs artistiques, petits festivals, MJC, salles de concerts, studios de pratique ou d’enregistrement, écoles de musique, médias associatifs, développeurs d’artistes… Elles font la vitalité musicale de nos territoires, structurent des parcours de vie en permettant à nos concitoyen·nes de vivre une aventure artistique, de s’exprimer et s’émanciper. Fonctionnant dans des économies hybrides qui mêlent recettes d’activités, subventions publiques et contributions bénévoles, beaucoup d’entre elles sont très inquiètes quant à leur capacité à poursuivre leur activité musicale dans les prochains mois. Cette situation nous invite à engager un changement de paradigme dans nos pratiques professionnelles comme dans les politiques publiques de la culture, que nous souhaitons réellement concertées et guidées par une attention sincère au respect des droits culturels.
Force est de constater qu’un certain nombre de signaux récents ne sont pas encourageants. Nous déplorons en ce sens le peu d’attention apporté à la reprise des pratiques musicales amateurs depuis plusieurs mois, comme en atteste les récentes injonctions paradoxales autour de la fête de la musique. La reprise des concerts debout ainsi que du secteur de la fête et de la nuit est désormais actée, et nous nous en réjouissons, même si la défiance et la stigmatisation témoignées en direction des pratiques et esthétiques musicales concernées nous inquiètent particulièrement. Loin de raviver les liens, la convivialité et l’espérance, cette reprise en ordre dispersée semble attiser les fractures générationnelles, économiques et sociales. Les destructions d’instruments de musique et de matériel de sonorisation opérées il y a quelques jours par les forces de l’ordre lors de la dispersion de la free party de Redon en sont une illustration particulièrement choquante et inacceptable.
Nous restons convaincu·es que la voie culturelle solidaire et concertée que le RIF porte depuis plusieurs années pour le développement des musiques actuelles en Île-de-France est la plus à même de répondre aux enjeux démocratiques et aux problématiques de développement durable / d’éco-responsabilité des territoires et de vivre ensemble. Nous nous félicitons d’ailleurs des partenariats et du dialogue fécond que le RIF a pu engager depuis trois ans et maintenir tout au long de ces derniers mois de crise avec les collectivités publiques – Région IDF, DRAC IDF, Départements en particulier – engagées dans les politiques publiques de la culture sur l’Île-de-France. Le réseau constitue ici une interface primordiale entre les dynamiques collectives des acteurs et les pouvoirs publics pour favoriser l’interconnaissance, l’identification de la réalité des pratiques musicales et des besoins des populations et la co-construction de dispositifs d’action publique. Nous travaillerons dans les prochains mois, avec l’ensemble de nos partenaires publics et professionnels, à ce que cette dynamique de concertation puisse se pérenniser et se déployer au plus près de la diversité des acteur·rices, des pratiques et des musicien·nes eux-mêmes, pour un développement équilibré et solidaire des musiques actuelles en Île-de-France.